20 janvier 2020.
Voilà 47 jours que l’opposition populaire s’exprime contre le projet de loi sur la retraite à points… Voilà 47 jours que le mensonge gouvernemental affirme que le projet de retraite universel est un progrès social et qu’il faut en finir avec les avantages iniques des régimes spéciaux. Voilà 47 jours que la violence policière devient peu à peu la seule réponse face aux manifestations des grévistes qui s’impatientent devant le refus de retirer cette réforme.
Dix huit mois de « concertation » avec Jean Paul Delevoye qui, au nom du gouvernement, était chargé de préparer les corps intermédiaires syndicaux au grand chambardement social de cette réforme. Pendant tout ce temps, les syndicats ont essayé de faire valoir leurs objections et leurs solutions alternatives mais Delevoye n’a pas bougé d’un iota de sa feuille de route gouvernementale même avec les syndicats enclins aux compromis habituels (les syndicats dits réformistes) c’est-à-dire accepter l’inacceptable au profit de quelques miettes cache-misères…
Ce gouvernement de technocrates et sa majorité sans expérience de députés souvent novices et sans véritables ancrages locaux ont été incapable de mesurer le niveau d’opposition qu’allait déclencher leur réforme. Ils pensaient que l’argument sur la suppression des régimes spéciaux, serait suffisant pour remporter l’opinion publique surtout s’ils martelaient en plus que le projet était favorable aux femmes…
L’ampleur des manifestations du 5 décembre 2019 a été une véritable surprise qui a secoué la quiétude initiale du gouvernement et de sa majorité d’autant que le vide abyssal du document ne permettait pas d’y voir clair en terme d’exploration des conséquences à moyen et long terme et donc a créé d’emblée une inquiétude chez la majorité des salariés tant du secteur privé que du secteur public…
Le mode de calcul proposé de la pension sur la base d’une carrière complète au lieu des 25 meilleures années du privé (ou des 6 derniers mois dans la fonction publique) laissait présager à tous que les pensions des futurs retraités allaient fortement baisser.
A cela est venu s’ajouter le fameux âge d’équilibre de la réforme comme seul outil d’équilibrage financier de la nouvelle caisse universelle qui forcément, du fait des catégories d’âge arrivant en retraite dans les 10/15 ans à venir (la queue du baby-boum) et du faible nombre de cotisants entrant, va provoquer progressivement le décalage de l’âge d’équilibre (donc de l’âge de la retraite à taux plein) jusqu’à possiblement 68/69 ans…
Et comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, le gouvernement veut absolument que les systèmes actuels soient équilibrés avant d’être réformés (2022) par la mise en place d’un âge pivot à 64 ans en 6 ans (2025) par un projet de loi spécifique.
Face à la mobilisation syndicale qui entraîne même la CFDT, l’UNSA et la CFTC, le pouvoir pense pouvoir jouer la montre grâce aux Fêtes de Noêl et du Nouvel An qui approchent. Le discours sur la trêve de Noël traverse tous les médias où les membres du gouvernement et les députés LREM viennent se répandre à longueur d’antenne.
Hélas pour eux, le mouvement tient et le soutien populaire est très largement supérieur à l’opposition des détracteurs (2/3 contre 1/3) sans compter les indifférents.
Après les fêtes et avec la complicité de Laurent Berger, un compromis est acté sur la suspension provisoire de l’âge pivot dans le projet de loi spécifique à l’équilibre des systèmes de retraites actuels. Le gouvernement laisse 2 mois aux acteurs sociaux pour trouver une solution à cet équilibre financier en interdisant, dans la lettre de mission de la Commission de Financement mis en place, d’augmenter le coût du travail et de baisser le pouvoir d’achat (interdisant donc l’augmentation des cotisations sociales des salariés et du patronat) en ne laissant la place qu’à la modification de l’age de la retraite…
La situation devient claire pour tout le monde, le gouvernement ne cédera pas facilement: le discours gouvernemental est désormais que la grève n’est plus légitime et la pression policière devient très présente contre les cortèges syndicaux et lors des actions de piquet de grève. Le ton se durcit et la violence aussi.
Comme l’an dernier avec les manifestations des gilets jaunes, les manifestations syndicales font l’objet d’une répression parfois féroce par certains gendarmes et policiers violents avec toutes personnes se trouvant sur leur passage sans discernement entre d’éventuels casseurs et les autres manifestants. Les journalistes en font également les frais car leurs images et témoignages dérangent parfois la hiérarchie et le gouvernement.
Il faudra quelques journées de brutalités et des vidéos sur les réseaux sociaux pour que, du bout des lèvres, les autorités politiques rappellent les devoirs des forces de l’ordre et diligentent quelques enquêtes…
L’absence de débouchés politiques à court terme, l’inflexibilité du gouvernement face aux grévistes et aux manifestants, la division syndicale à cause de la position prise par la CFDT et l’UNSA, parfois contre leur base, la faible représentativité des syndicats, notamment dans le privé, qui les prive d’une capacité à faire grève massivement, malgré le soutien populaire, conduisent à crisper dangereusement la situation.
Là où tout dirigeant politique serait enclin à faire descendre la pression, Macron et son gouvernement font exactement le contraire: aucun temps de dialogue, aucune concession et organisation du passage du projet de loi au pas de charge à l’Assemblée Nationale, sans réelle discussion sur son financement ni sur ses impacts sociaux et laisse la main libre au gouvernement pour décider après le vote et par décret de tous les aspects financiers impactant l’ensemble des salariés. Du jamais vu!
Ce Gouvernement et ce Président, je l’avais écrit dans une précédente chronique n’ont que le mépris du peuple et manient le mensonge à longueur de discours.
De plus ils vont, je le crains, provoquer des réactions de violences qui seront de plus en plus présentes alors que les moments de négociation seront de moins en moins nombreux.
Les casseurs se sont d’abord eux: les casseurs de notre système de Retraites, de notre système de Sécurité Sociale, tout l’héritage de la lutte de nos aînés depuis plus d’un siècle.
Honte à eux qui abaissent la République.
Contre la violence de leurs attaques, il nous faut serrer les coudes, être ensemble encore plus fort..
Pour les arrêter, il faut tout arrêter, la grève générale est le seul chemin.
Chronique Copyright Daniel Margreth.