4-Une histoire de choix

18 janvier 2021.

Présentation :
« Franck, je l’avais rencontré pour la première fois à Paris au début de l’été 72. La vie de Franck était remplie de souvenirs parfois enfouis à jamais dans les méandres de sa mémoire alors que d’autres étaient présents en permanence, presqu’obsessionnels. Il m’en parlait pour reconstruire un passé qui tentait de lui échapper. Du moins c’est ce que je croyais.
« 

Le narrateur vous entraîne « Dans le désordre » de ces souvenirs tels qu’il les a recueillis.

Dans le désordre / 4-Une histoire de choix.

C’est à ce moment qu’une question m’avait envahi : comment savoir si le passé que Franck me racontait était vrai ? Je ne le savais pas et je n’avais aucun moyen de le savoir… J’étais obligé de lui donner crédit à priori car je ne le connaissais pas suffisamment pour me faire une véritable opinion. C’était en fait la première fois que j’étais confronté à la notion de vérité face au récit d’un inconnu. Jusqu’à maintenant tous ceux dont j’avais reçu une information faisait autorité que ce soit ma famille ou le personnel enseignant. Bien sûr j’avais vécu personnellement ou j’avais été témoin de moments de vérité déformée ou même de mensonges mais cela n’avait pas remis en cause globalement la notion de vérité : l’autorité et l’histoire de mon éducation avaient été trop fortes pour permettre même le moindre doute à ce sujet. Franck m’obligeait à choisir de croire ou non à ses souvenirs. Un monde nouveau s’ouvrait donc pour moi, celui du choix, celui du monde des adultes. J’avais 22 ans, il était encore temps !

Cela dit, une partie de mon confort de vie venait de s’écrouler. Avant ce début de réflexion autonome je croyais le récit des personnes que j’aimais ou choisissais d’aimer et je ne prêtais aucun crédit aux autres et cela d’autant plus que je ne fréquentais que des gens qui partageaient à priori la même façon de penser que la mienne, et en vérité plutôt la même façon de penser que mes parents ! Le couvercle de la marmite avait disparu et j’étais bien obligé d’observer son contenu ! Et pour être très honnête mon éducation ne m’avait que très peu donné d’outils pour ne pas me perdre dans un dédale d’interrogations et d’inquiétudes. Je prenais donc très simplement la décision de croire ce que me racontait Franck pour me simplifier la vie dans l’instant présent. Il serait toujours temps de mettre un terme à notre relation amicale si je le jugeais utile ultérieurement.

En parallèle de nos rencontres quasi quotidiennes soit dans le logement que me prêtait Solange dans le Marais soit dans des bistrots dans les différents quartiers de Paris où Franck m’entrainait, je cherchais du travail et lisais assidument les petites annonces de « L’Usine Nouvelle » pour y trouver celle qui pourrait m’ouvrir le monde du travail en rapport ou non avec ma formation, un DUT de Génie Mécanique, et les quelques expériences professionnelles que j’avais eues avant mon service militaire et juste après mon retour… Comme mes études avaient été choisies par mes parents, je n’étais pas très fixé sur le métier que je cherchais. Ma seule certitude, c’était de vouloir trouver de quoi financer ma vie à Paris pour ne pas être obligé de retourner vivre chez eux. L’autonomie financière était ma seule véritable motivation.

Il y avait une cabine téléphonique dans la rue Saint Antoine, c’était facile de m’y rendre depuis mon logement rue de Turenne: il me suffisait de suivre la rue. Cette cabine était devenue un endroit familier ainsi qu’un café sur la place des Vosges où je prenais souvent une collation lors de mes trajets jusqu’au téléphone. Au bout de quelques appels, j’avais obtenu mon premier rendez-vous dans une entreprise en haut de la rue du Chemin Vert tout près du cimetière du Père Lachaise pour un poste de dessinateur industriel. Je m’y étais rendu et aussi incroyable que cela pouvait paraitre le responsable du bureau d’études, au bout d’un entretien agréable et qui m’avait paru court, me confirmait mon embauche dès le début de semaine suivante pour une période d’essai d’un mois. J’étais heureux, le travail me semblait intéressant et l’entreprise était à moins d’une demi-heure de mon logis à pied. Cela faisait une semaine que j’étais arrivé à Paris et tout semblait aller dans le bon sens.

Je racontais la bonne nouvelle à Franck dès le lendemain et un souvenir lui revenait au sujet du Père Lachaise…

A suivre…
Texte Copyright Daniel Margreth.

Daniel Margreth

Jour et Nuit. Des nouvelles d'ici et d'ailleurs. Photo-Reportages, Chroniques, Art et Culture.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s